Chorale

Selon le dernier rapport de l’OMS, 285 millions de personnes dans le monde sont atteintes de déficience visuelle. Ces données indiquent en outre que 80% des déficiences visuelles, cécité comprise, sont évitables. Cependant la répartition de la prévalence du handicap visuel n’est pas égale dans le monde. En effet, la pauvreté constitue un facteur essentiel du handicap. Aujourd’hui, 90% des personnes atteintes de déficience visuelle vivent dans un pays en voie de développement. Cette corrélation évidente entre pauvreté et cécité s’explique en grande partie par le manque de prévention des maladies oculaires, l’ignorance quant aux causes des maladies, et le manque d’accès aux soins.

Zone du globe particulièrement pauvre, l’Afrique subsaharienne compte, à elle seule, 26 millions de personnes handicapées de la vue, dont 6 millions atteintes de cécité totale. Aujourd’hui, plusieurs ONG se sont spécialisées dans la prévention des maladies de la vue avec notamment des sessions de dépistage et actions de sensibilisation sans oublier les interventions chirurgicales ou médicamentées. Nous serions alors en droit de nous demander si la trajectoire choisie par la MEB d’œuvrer en aval pour le bien-être des personnes handicapées de la vue fait encore sens ? Voici une esquisse de réponse.

La situation des personnes handicapées de la vue en Afrique subsaharienne ne se limite pas seulement à une perte d’un sens, si utile soit-il. La cécité est encore malheureusement souvent synonyme d’exclusion. Que ce soit dans l’accès aux services, au sein du cercle familial ou de la société, l’aveugle est perçu comme une personne inférieure n’ayant pas les mêmes capacités qu’une personne voyante. A cela s’ajoute l’ignorance des causes de la cécité, assimilée à des croyances négatives. Considérés comme démoniaques et possédant d’autres déficiences mentales, les handicapés de la vue restent en marge de la société. C’est particulièrement dans ce souci de restauration de la dignité humaine que le MEB s’est investie auprès des aveugles en Afrique. Proposant des solutions alternatives comme la création d’écoles inclusives permettant le côtoiement d’enfants voyants et non-voyants ou des activités socioprofessionnelles pour jeunes adultes, la MEB et ses partenaires souhaitent, au travers de démarches pratiques, mettre en évidence les capacités des non-voyants.

Un travail de sensibilisation et de responsabilisation est effectué auprès des églises locales. Outre l’endroit de recueillement, l’église constitue aussi un lieu de communion fraternelle. Si de prime abord, chaque église devrait être un lieu d’accueil pour les personnes les plus vulnérables, l’intégration des personnes handicapées n’est pas toujours chose aisée. En effet, il n’est pas toujours facile pour une personne non-voyante de discerner ses dons et de trouver son ministère. Au Bénin, l’ONG Bartimée avec qui la MEB collabore, a mis sur pied une chorale composée de personnes non-voyantes qui a pour but de sensibiliser les églises locales à la situation des personnes handicapées de la vue. Particulièrement douées en musique, les personnes aveugles peuvent ainsi intégrer le ministère de la louange et vivre une communion partagée au travers du chant.

Jean Marc Aimontché, responsable de la chorale de l’ONG Bartimée en témoigne :
« Je suis content quand chacun essaie de donner le meilleur de lui-même en suivant les instructions lors d’invitations dans les églises, veillées de prière au sein des paroisses et dans les maisons qui nous accueillent.
Cette responsabilité me permet de mieux connaître les frères, apprendre à encadrer, supporter les caprices à certains moments.
J’apprends à être leader pour la cause des personnes aveugles. Je demande à Dieu de fortifier davantage le groupe et de nous aider à toucher beaucoup de cœurs pour faciliter l’insertion sociale des personnes aveugles et malvoyantes ».

Si aujourd’hui les progrès médicaux ont permis de faire reculer l’étendue de la cécité, nous nous devons d’œuvrer encore pour l’amélioration des conditions de vie des personnes aveugles et sensibiliser la population à leurs droits. La spécialisation de la MEB – venir en aide aux aveugles et malvoyants dont la situation est irréversible – fait sens dans une société où le lien social et spirituel est essentiel et dont les aveugles sont encore trop souvent exclus. Grâce aux témoignages que représentent les malvoyants, les mentalités évoluent et une réelle reconnaissance de leurs personnes devient possible.

Cynthia Guignard